Il était une fois, une femme qui a eu une idée de combiner ses deux passions : la photographie et les jardins. Elle ne savait pas que la découverte de la nage en eau libre allait changer sa façon de voir ses environs, son pays, son paysage à elle. En allant à vingt minutes de chez elle, d’abord en famille, puis toute seule, elle a trouvé un lac, ni trop grand, ni trop petit, pour y faire un tour de deux kilomètres en une heure et demie. Seule, ou accompagnée. Equipée, mais sans rechercher la performance sportive. Elle y nageait lentement, à son rythme ayant comme but de regarder le paysage, d’observer ses détails, les rochers, la lumière et les reflets sur la surface de l’eau. En été, elle photographiait, profitant des jours sans fin pour capter les moments qu’elle trouvait magiques.
Elle commence à faire des recherches pour trouver d’autres lacs similaires à celui de Pilvijärvi à Sipoo. Pour y nager, comme on se promène. Elle passe des heures devant les cartes et les livres, sur Internet et les blogs parlant de l’open water swimming. Elle trouve que l’expression wild swimming correspond le mieux à sa façon de vivre ces moments dans l’eau. Parfois, en voyage professionnel, en voiture, elle choisit un lac par hasard en regardant la carte, le doigt pointant une tache bleue sur la carte. La plage publique peut aussi convenir, s’il n’y a pas moyen de trouver un endroit où nager. L’essentiel est de se sentir dans l’eau, d’être dans le mouvement sans précipitation, voir ce qui est autour, enfin voir et ressentir le monde d’un point de vue différent. Voir et sentir le temps changer. Voir le soleil se lever, se coucher. Voir son reflet sur l’eau. Oublier le temps.
Il était une fois, un homme qui voulait retrouver ce qu’il avait laissé derrière lui dans son pays natal, l’Espagne. L’eau de la mer, le sentiment de ce liquide autour de son corps, mais aussi la sensation des mouvements faits dans l’eau. Là-bas, en prenant son vélo très tôt le matin et en pédalant treize kilomètres pour se rendre dans un endroit secret, il atteignait la mer. La mer dans tous ses états, bleue, turquoise, verte, mais aussi le monde sous l’eau, avec les poissons, les étoiles de mer et les coraux ; la vie aquatique. Un rythme quotidien qu’il conservait méticuleusement à travers des aquarelles qu’il réalisait après la nage. Les formes, les couleurs, les faits et les sentiments se couchaient sur le papier. Une collection des heures précieuses.
À Helsinki, il a trouvé de nouveaux repères. Un paysage caractérisé par des roches moutonnées, de petites îles et les maisons typiques de l’archipel. Il y retrouve surtout son élément, l’eau, tout près de lui. Il découvre un endroit propice à la nage à quatre kilomètres de chez lui. Les sensations ne sont pas les mêmes. L’eau de la mer baltique est foncée, quasiment noire et surtout froide, très froide. Même avec la combinaison de natation il n’entre dans l’eau que lorsque celle-ci est à dix ou douze degrés, c’est-à-dire de partir du début de mai. Certaines mauvaises expériences qui auraient pu se révéler fatales, lui ont beaucoup appris, sur l’eau, sur son corps. La peur ne l’arrête pas, mais il écoute, respecte davantage la nature et les conditions nordiques. Il trouve les lacs plus réconfortants que la mer, mais également plus mystiques. L’eau douce rend sa peau plus douce. Il y reste, mais pas pour découvrir le monde sous l’eau. Cette fois-ci, c’est le paysage au-dessus de la surface qui l’intéresse et lui offre un espace à lui.
Il était une fois, dans un pays aux mille lacs, deux personnes qui avaient trouvé leur paysage.