Deux dossiers viennent ainsi explorer ces rapports compliqués, le premier revenant sur les pratiques nouvelles du pâturage urbain et le second sur le sort si emblématique des abeilles.
Dans un premier texte Olivier Bories, Corinne Eychenne et Charline Chaynes introduisent la place actuelle de l’éco-pâturage au sein de la notion grandissante d’agriculture urbaine avant de développer le cas précis de la commune de Cugnaux en périphérie Toulousaine. Mathieu Bréard évoque un cas similaire d’installation de troupeaux au Sud de Nantes, l’ensemble des auteurs interrogeant également les limites de ces démarches. Au cours d’un entretien, Anaïs Jeunehomme et Rémy Muriach de la société Ecomouton poursuivent ces questions et échangent autour du développement concret de l’éco-pâturage par une entreprise à l’échelle nationale.
Ces différents articles dépeignent une présence animale nouvelle dans l’espace et dans le projet urbain, questionnant l’effacement progressif des limites entre ville et agriculture, ou du moins de formes issues de l’agriculture puisque ces expériences se limitent pour l’instant à une pratique d’entretien. Si la ville moderne et hygiéniste avait mis à l’écart l’animal élevé, il se dessine à l’inverse aujourd’hui les contours d’une ville qui tente l’alliance visible entre urbanité et ruralité.
Le dossier sur les abeilles compte deux articles issus de travaux de recherche. Fabrice Requier et Violette Le Féon nous parlent d’abord des relations entre abeilles et évolution de l’espace et des pratiques agricoles depuis plusieurs décennies. Cet article revient d’abord sur l’écologie de ces individus puis fait le constat d’une diminution progressive des conditions de vie, de récolte et d’habitat interrogeant les raisons multiples et conjointes de cette dégradation. Fanny Rhoné et Eric Maire, appuyés par un groupe plus large de chercheurs, abordent ensuite les relations plus particulières entre les abeilles et les végétaux ligneux. Ils montrant que ces derniers jouent un rôle bien plus important qu’on ne le pense dans un débat public dominé par l’utilisation des produits phytosanitaires. Ces deux articles abondent dans une même direction pour la préservation et le développement des abeilles, avec la nécessité d’imaginer des paysages productifs, accueillants et durables pour tous, Homme et monde animal.
Au-delà de ces deux dossiers, Gaëlle Caublot évoque le sort du Muscardin, petit rongeur habitant des haies et dont la fragile survie dépend étroitement de celles-ci et de leur persistance. Pour conclure cette thématique nous avons choisi le texte de Sophie Lheureux qui, dans le cadre de son travail de diplôme, tente le récit d’un regard animal sur les terres du Haut-Allier au cœur du Massif Central.
Ce numéro d’Openfield sur l’Animal s’accompagne de contributions ouvertes. Alexis Pernet développe dans un essai la possibilité de penser le grand paysage comme fédérateur d’une vision collective du projet et de sa complexité. Dans un contexte où les structures territoriales sont sans cesse mouvantes et bousculées, notamment pour les territoires ruraux, cette approche montre notamment une manière d’imaginer et d’accompagner le projet commun par le territoire et par la démarche paysagère au sens large.
A l’autre extrémité de l’échelle spatiale Didier Lestrade nous parle du jardin comme une part intime, personnelle et réconfortante, petit bout de territoire vivant qui porte l’existence de celui qui le façonne et qui en retour lui donne un appui bienveillant dans des moments heureux comme douloureux.
Thierry Lamant évoque de son côté la diversité des chênes qui restent, pour la grande majorité d’entre nous, méconnue. Cette contribution est largement agrémentée de photos invitant le lecteur à se rendre compte de l’intérêt d’une utilisation plus large de ce genre aux possibilités insoupçonnées.
Ce numéro se conclut par le travail pictural de Dorian Cohen, ancien ingénieur en génie civil devenu pleinement artiste. Sa peinture, accompagnée du texte de Clara Régy, s’attache à regarder après avoir éloigné toute présence humaine les paysages contemporains ordinaires de nos périphéries, entre béton et présences végétales décidées ou spontanées, entre tranquillité et inquiétude.
Nous vous souhaitons une bonne lecture,
Revue Openfield