Le projet Éclats de Paysages a été réalisé dans le cadre des travaux d’extension de l’Hôtel de Ville de Beaumont (Puy de Dôme). Il comprend plusieurs pièces implantées dans le parc réaménagé et sur le toit terrasse du bâtiment.
Éclats de paysages : Blocs de roches naturelles (basalte) extraits in situ lors des terrassements, peints, et disposés dans le parc. Ils en jalonnent le parcours.
Air(e)s de repos : Sculptures composées d’un module en contreplaqué peint et d’un panneaux en résine monobloc teinté dans la masse. Elles sont implantées au fond du parc, sur une zone formant belvédère sur le grand paysage, et un élément sur le toit terrasse du bâtiment.
Air(e)s de repos et Éclats de paysages – en 2013
Commande publique déconcentrée par la ville de Beaumont avec l’aide du ministre de la culture et de la communication-Drac Auvergne.
Éclats de paysages
1> SE 1487 Bleu Ontario
2> SE 1491 Bleu Bahamas
3> SE 1451 Bleu Antigna
4> SE 1884 Bleu Mitario
5> SE 1887 Bleu Tongting
6> SE 1454 Bleu Victoria
7> SE 1599 Vert Carter
8> SE1603 Jaune Caravane
9> SE 1624 Jaune Ensor
10> SE 1669 Orange Navel
11> SE 1079 Rose Lilas
12> SE 1423 Rose Jacinthe
13> SE 1732 Rouge Cahors
14> SE 1758 Rouge Basque
15> SE1788 Brun Labours
16> SE 2013 Vert Buisson
17> SE 2005 Vert Bangalay
18> SE 1990 Vert Ronce
19> SE 1524 Vert Estragon
20> SE 1976 Vert Tremble
21> SE 1551 Vert Catapla
Point de vue.
Texte de Martial Deflacieux. 2013
Regarder un paysage a l’apparence de la simplicité que lui confère l’assurance d’un point de vue. Le paysage existe d’où on l’observe, il est en ce sens ce qui élimine de la vision le reste de ce qui le compose. Le paysage est son propre fragment. Regarder un paysage c’est découvrir ce qui lui manque et se dérobe. Notre attrait pour les couchers de soleil en est le symbole. La disparition du jour semble faite à son image. D’Epinal, cette image ne peut avoir la force de ce qu’elle révèle tant l’enjeu est de taille ; accepter de voir au delà du paysage, ce qui nous traverse.
De fragment il est question ici, de paysage aussi. Valérie du Chéné s’intéresse à lui, non pas comme on traite un sujet de représentation mais devrait-on dire, en l’abordant. En lui tournant autour, en l’observant ; l’artiste prend ses dimensions. Non pas celles que l’on mesure en évaluant la distance mais celles que l’on découvre cachées, enfouies comme les roches volcaniques présentes dans le parc municipal de Beaumont. Cette façon de questionner le paysage est troublante car elle démontre une paradoxale proximité avec la nature même du paysage, avec son caractère partiellement invisible. Parce que leurs différentes facettes ont été peintes, ces pierres qui avaient échappé jusqu’à présent au regard et à la lumière du jour se sont dotées d’une éclatante vitalité obtenue par le recouvrement pictural. Découvrir, recouvrir sont d’usage courant dans la pratique de Valérie du Chéné. Faire apparaître l’objet de son attention en préservant sa force d’évocation semble lui être essentiel. C’est un équilibre ténu d’où se dégage une évidente poésie.
La très grande majorité des formes produites par Valérie du Chéné sont picturales. Considérer les volumes et modules présentés à Beaumont comme des sculptures serait un contresens. Tous deux sont peints et se révèlent véritablement à travers cette opération. Mais considérer le travail uniquement sous cet angle serait incomplet. Le langage, par exemple, préoccupe discrètement mais réellement la démarche de l’artiste. L’inscription sur des notices techniques du nom des couleurs peintes sur les roches provoque à cet effet une lecture inattendue :
Roche N°1
Bleu Ontario
Bleu Bahamas
Rose Jacynthe
Vert Ronce
Bleu Victoria
Tremble
Vert Buisson
Bleu Tongting
Rouge Basque
Il s’agit là de couleurs auxquelles les fabricants de peinture donnent le nom d’îles, de fleurs, de plantes, de lieux. Cela peut paraître anecdotique mais il se passe à l’évidence quelque chose entre les roches basaltiques d’une grande noirceur, leur poids, leur gravité et le fin nuancier de 21 aplats de couleurs aux noms exotiques qui va être utilisé pour les transformer. Les éclats de paysage sont le fruit d’un processus qui les a vu apparaître hors du sol, devenir peinture et se métamorphoser. Ils sont étrangement à la fois partie intégrante du parc, ils en composaient le souterrain et reposent sur lui, mais également et manifestement, pour reprendre l’étymologie du terme, exôtikos, en dehors de lui. (…)